nothing worths a lunch with her sister. ♥

« - Veuillez je vous prie noter la conclusion au sujet d'aujourd'hui qui est, je vous le rappelle, "qu'est-ce qu'un fait?", si vous ne voulez pas avoir une mauvaise note à l'interrogation de fin de mois; "La question du fait, quand on a compris qu’elle était aussi bien celle du vrai, c’est que la vérité ait une cause, et que cette cause le soit en renvoyant à vanité le savoir dont elle est pourtant exhaustivement constituée. Autrement dit la question du fait se situe dans une interrogation dont le cadre est constitué par celle de l’irréductibilité de la vérité au savoir ou, si l’on préfère, par celle de leur distinction. Par ce terme, on indique ici qu’il n’y a pas de vérité sans savoir, mais il n’y a de vérité que là où le savoir ne compte pas. Eh bien cette distinction, quand on la considère non pas comme une nécessité logique et juridique (l’interdiction de rabattre la vérité sur le savoir, dont elle ne diffère pourtant pas), mais dans son réel, c’est le fait. En somme tout fait se ramène à un seul qui est la distinction du savoir et de la vérité – et c’est d’elle que nous faisons à chaque fois l’épreuve dans la confrontation au fait." Je ne répéterai pas donc débrouillez-vous! A la semaine prochaine! »

La philosophie avait beau être une de mes matières préférées et que j'étais obligée de suivre, faisant des études de psychologie, je fus plus qu'heureuse quand la sonnerie annonçant la fin du cours et le début de la pause déjeuner retentit dans tout le campus. Je rangeais toutes mes affaires, vérifiais une dernière fois que je n'avais rien oublié quand je remarquai les coups d’œil incessant de la jeune femme assise à côté de moi pendant la précédente heure et demi; je me sentis comme obligée de lui retourner son sourire et de partir en direction de la porte de sortie en arquant le sourcil en me demandant qu'est-ce qu'elle me trouvait. Arrivée dans les couloirs, je tentai tant bien que mal de me frayer un chemin à travers la foule d'étudiants qui allaient et venaient dans le bâtiment, mon point d'arrivée n'étant autre que la cafétéria, de nombreuses personnes me suivaient; je pressai le pas afin d'être sûre d'avoir une place assise que j'aurai choisie et de garder une place pour ma sœur, Alyx. C'était comme un rituel pour nous de déjeuner ensemble au moins une fois par semaine quand on savait que l'autre n'avait pas préparé un sandwich à manger pendant un intercours à cause de son emploi du temps. Je fus, à ma plus grande surprise, une des premières dans le réfectoire et ne pus qu'afficher un grand et étincelant sourire sur mon visage. M'emparant de mon plateau, je suivais les élèves qui se pressaient pour avoir l'embarras du choix niveau bouffe -quitte à faire de même autant suivre la marche- et choisi finalement le menu suivant: concombres en sauce pour l'entrée, Chili con carne pour le plat principal et enfin une mangue pré-coupée pour le dessert. Je ne faisais pas forcément attention à ma ligne mais l'appétit n'était pas tellement là aujourd'hui, j'occupais plutôt mon esprit à chercher des sujets de conversation à avoir avec Aly'. Sortant de la queue, je me dirigea vers une table ronde située au fond du réfectoire, à côté des fenêtres; la lumière du soleil se reflétait sur la table parfaitement propre jusqu'à présent -ce n'était pas sûr qu'elle serait toujours aussi propre quand on aurait fini de manger vu comment on pouvait manger proprement ma sœur et moi. M'asseyant sur ma chaise, et posant mon plateau, je promenais mon regard sur les gens qui entraient dans le réfectoire, qui en sortaient, qui allaient s'asseoir, qui riaient, qui mangeaient, espérant voir celle avec qui j'étais liée par le sang que je le veuille ou non entrer à son tour. Je tapotais le bois du bout des doigts et me servit un verre d'eau que je bus sans attendre.

nothing worths a lunch with her sister. ♥

Avalant mon verre d'eau d'un trait, je ne pus m'empêcher de tirer la langue et de faire une grimace de dégoût après l'avoir fini, comme d'habitude, car je trouvais ça... fade. C'est vrai, bien que l'eau soit rafraîchissante et essentielle à la santé, le "goût" qu'elle avait ou justement n'avait pas m'avait toujours dérangée, du plus loin que je m'en souvienne. Je jetai un coup d’œil furtif à la foule dans le réfectoire et aux élèves assis aux tables voisines pour vérifier qu'aucun d'eux ne m'ait surprise en train de faire mon petit scénario. Après cela, je me mis à tripoter tout ce qu'il y avait sur mon plateau, en commençant par mes couverts que je tournais, retournais, dans un sens, puis dans l'autre; toutes les cinq secondes, je laissais s'échapper un soupir, levais les yeux au plafond puis les reposaient sur mon portable que j'avais sorti pour regarder l'heure. Je n'avais absolument aucune idée de l'heure à laquelle ma sœur allait se pointer, ni si elle était sortie de son dernier cours et si elle n'avait pas oublié notre déjeuner. Elle n'habitait pas avec moi et ça depuis longtemps puisqu'elle avait quitté la maison peu avant que j'aille à l'hôp... enfin vous savez où.? Souriant aux gens qui longeaient ma table pour aller s'asseoir ailleurs que je connaissais, je faillis me lever pour suivre leur pas et aller m'installer avec eux quand enfin je la vis arriver. Elle n'avait pas dû me voir tout de suite puisqu'elle s'intégra dans l'interminable queue pour accéder aux plateaux et à la nourriture; ses longs cheveux bruns n'étaient aujourd'hui pas retenus par un élastique et tombaient sur ses épaules dénudées et son dos, masquant ainsi ses yeux quand elle était de profil. Un léger sourire de soulagement se dessina alors sur mon visage et je me tournai vers les fenêtres d'où le soleil m'éblouit sans prévenir, mais je lui tenais tête, gardant mes yeux ouverts au risque de finir aveugler; je voulais juste sentir la chaleur de ses rayons parcourir mon corps pour me réchauffer. Le soleil n'était pas toujours au rendez-vous ici en Louisiane, alors autant en profiter; aucune tempête ni grosse pluie de prévue, seulement ce bon vieux soleil pour embellir notre journée. Je me félicitai alors d'avoir choisi une table près des fenêtres et décida enfin de détourner mon regard. Comme escompté, j'eus un bon moment d'aveuglement, durant lequel la seule chose que je voyais était une intense lumière. Je décidai de frotter doucement mes yeux pour retrouver la vue et ne pas me retrouver les yeux et le visage enduit de mascara et eyeliner. Parce que oui, j'aimais beaucoup porter du maquillage, pas forcément pour ressembler à une de ses top-modèles sur-maquillée qu'on voyait dans les magazines et à la télévision, non, seulement pour me sentir jolie, et savoir que mon regard pourrait être ainsi illuminé et embelli. On me disait souvent que je n'avais pas besoin de ça pour être jolie, mais je me contentais alors de rougir, de détourner les yeux, de rire d'une façon gênée et de bafouiller que la personne qui disait ça mentait. Je ne me sentais pas narcissique et plutôt du genre modeste je n'allais pas leur donner raison. « Max » entendis-je alors que je recouvrai tout juste la vue, sursautant alors et apercevant le visage illuminé d'un sourire et du soleil de ma soeur; je clignai les paupières plusieurs fois pour être sûre que tout ça n'était pas le fruit de mon imagination et que ma vue ne me jouait pas de tour. « Tu vas bien ? » J'avais envie de répondre que oui mais malheureusement j'étais toujours un peu confuse; finalement je pus voir complètement et sans le moindre flou ce qui m'entourait et finit par rendre le sourire à la grande brune qui s'était assise à ma table. Puis avant même que je puisse répondre, elle enchaîna: « Tu manges que ça ? ». Je baissai les yeux sur mon plateau, puis sur le sien, et trouvai qu'elle n'était pas gonflée de dire ça sachant que le sien n'était pas beaucoup plus remplie. « J'ai pris un bon petit déjeuner et j'ai mangé une pomme après les deux premiers cours; et tu peux parler ma vieille... » lançai-je avec un sourire plein de malice aux lèvres et un petit rire rauque qui provenait du fond de ma gorge.